La journée mondiale des toilettes
World Toilet Day
Le mardi 19 novembre, c'était la journée mondiale des toilettes. La cause prête à sourire au premier abord, et pourtant, une femme sur trois dans le monde n'a toujours pas accès à des latrines salubres et privées. Une problématique lourde de conséquences, sécuritaires, sanitaires et aussi économiques.
"Ca serait dommage de s'assoir sur le sujet!" lance fièrement le rédacteur en chef, dans un sourire complice. "Cette journaliste? Elle est sur les toilettes en ce moment" ricane un autre. Forcément, "la journée mondiale des toilettes", ça fait jaser. Pourtant, le rapport parrainé par l'ONG WaterAid est loin d'être comique. Il révèle qu'une femme sur trois dans le monde n'a pas accès à des toilettes salubres. En Afrique, il s'agit de 70% des femmes. Un problème dont on prend difficilement la mesure en Occident, c'est pourquoi l'ONG a réalisé un petit film qui imagine ce que pourrait être la vie quotidienne des occidentales si elles n'avaient pas accès à l'assainissement. Efficace.
Ne pas avoir accès à des toilettes salubres, qu'est ce que ça implique? "Lorsque les femmes n'ont pas accès à des toilettes salubres, sûres et privées, elles sont exposées à des risques et deviennent vulnérables, explique la directrice générale de WaterAid Barbara Frost. Et si elles vont se soulager dans la nature, elles risquent d'être harcelées. Les femmes n'aiment pas en parler ou ont de la réticence à se plaindre. Mais le monde ne peut continuer à ignorer leur situation."
Honte, violence et peur
Au premier rang des conséquences du manque d'assainissement, la honte est
peut-être la plus pesante. De tous les problèmes quotidiens des femmes, aucun
ne les affecte plus intimement que le manque de toilettes. Une humiliation
quotidienne, d'autant plus insupportable pendant les menstruations, ou pour les
femmes victimes de diarrhées chroniques, ce qui touche justement le plus celles
qui n'ont pas accès à des toilettes salubres, et privées.
C'est d'ailleurs la honte qui les pousse à préférer la nuit pour aller aux
toilettes, alors que c'est précisément à ce moment là qu'elles risquent le plus
pour leur sécurité. D'après des enquêtes menées à Delhi et Kampala, des femmes
ont signalé que des hommes se cachent la nuit dans les toilettes publiques pour
les voler ou les agresser. Ces enquêtes révèlent également que 94% des
répondantes ont été brutalisées ou harcelées lorsqu'elles sortaient pour aller
aux toilettes et que plus d'un tiers a été physiquement agressé.
Des rapports publiés par Amnesty International et les Nations Unies vont encore
plus loin : "La nécessité de s'éloigner de la maison pour
aller chercher de l'eau pour la famille expose les femmes et les filles à des
risques de harcèlement sexuel ou de viol. Ces risques existent aussi pour les
femmes qui n'ont pas accès à des toilettes proches et salubres et qui doivent
chercher un endroit isolé pendant la nuit". Dans deux
bidonvilles de Delhi, des femmes ont cité des cas spécifiques de fillettes de
moins de dix ans qui ont été violées alors qu'elles allaient aux toilettes
publiques.
Conséquences
économiques
"Parfois, je sors pour chercher un
endroit, mais j'ai tellement honte que je retourne chez moi sans être allée aux
toilettes". C'est le quotidien de Sandimhia Renato, une
Mozanbicaine de 18 ans qui doit marcher chaque jour 15 minutes pour trouver un
endroit où se soulager. WaterAid a fait le calcul, dans le monde en
développement, les femmes et les filles passent 97 milliards d'heures par an à
chercher un endroit approprié pour aller aux toilettes... Soit le double des
heures travaillées chaque année par la population active au Royaume-Uni.
De manière générale, le manque d'assainissement et d'eau potable ralentit la
croissance économique et coûte 5% du produit intérieur brut de l'Afrique
sub-saharienne chaque année. Soit l'équivalent des aides versées par les pays
occidentaux dans tout le continent africain.
19.11.2012 Anna Ravix http://www.tv5.org
Listen to the song Got to go poop