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«La langue française n'est pas misogyne»

The French language isn't misogynistic

 

Selon Eliane Viennot, professeure de littérature de la Renaissance et historienne, la langue française traduit une inégalité existante alors même «qu'elle est équipée pour dire l'égalité». Elle explique au Figaro pourquoi il est nécessaire de remettre en question la règle du masculin qui l'emporte sur le féminin et précise que l'État est tout à fait légitime pour trancher les querelles linguistiques.

Eliane VIENNOT. - Depuis le XVIIe siècle, les grammairiens ont masculinisé délibérément la langue. Ils ont condamné des noms féminins et inventé des règles comme «le masculin l'emporte sur le féminin». Or, avant, on ne connaissait pas ce dogme. On accordait les noms avec les adjectifs en fonction de leur place dans la phrase ou en fonction de l'importance des termes. On écrivait par exemple: «On peut aller voir les coteaux et les montagnes voisines» et non pas comme maintenant «les coteaux et les montagnes voisins».

C'est l'école primaire publique qui à la fin du XIXe siècle a rendu obligatoire ces règles inventées aux XVIIe et XVIIIe siècles.  Il faudrait que l'on retrouve la liberté d'accord

La féminisation des noms de métier

Prenez le mot «autrice», qui existait déjà au XVe siècle. Les Français s'imaginent que c'est un néologisme. Or, ce sont les grammairiens masculinistes qui l'ont fait disparaître. Comme ils ont voulu faire disparaître compositrice, écrivaine, poétesse, médecine, etc.

Y a-t-il une construction sociale derrière la construction de la langue?

Le langage est une pratique sociale. Dans les langues qui possèdent les genres féminin et masculin, il est normal donc, que les hommes parlent d'eux au masculin et les femmes, au féminin. Dire d'une femme «c'est le maire» ou «c'est le juge», cela va à l'encontre du fonctionnement du français. Il n'empêche que c'est ce qu'on apprend à l'école, parce que l'école a été instrumentalisée pour diffuser ces usages.

On a l'impression que la langue a toujours donné une supériorité au masculin sur le féminin. En réalité beaucoup de ces usages ne sont pas très vieux et il serait très facile de s'en débarrasser. D'ailleurs les enfants n'utilisent jamais de mots masculins pour parler des femmes. Ils disent «la juge» et non pas «ljuge». L'école ne leur apprend plus - du moins j'espère - que c'est une erreur, mais elle continue d'enseigner que le masculin l'emporte sur le féminin. Tout le monde comprend que cette règle n'est pas seulement linguistique mais sociale.  C'est parce qu'on nous explique que quatre féminins et un masculin doivent s'accorder au masculin qu'on trouve normal, quand on s'adresse à 99 femmes et un homme, de parler au masculin.

  • D'après moi, le général de Gaulle est le père du langage inclusif. Il commençait ses discours par «Françaises, Français».
  • On devrait dire l'être humain plutôt que l'Homme. Peu importe que le mot soit masculin. L'humain désigne l'humanité. De la même façon, la population est un mot féminin qui parle de «tout le monde». Les mots ne sont pas genrés, donc cela ne pose pas de problème.

Extract from article by   Alice Develey  www.lefigaro.fr